top of page

La vigne et le vin dans les fresques et les peintures murales antiques

VITICULTURE ET VINIFICATION DANS L'EGYPTE ANTIQUE

1a. La première représentation du procédé de vinification est le fait des Égyptiens, au IIIe millénaire avant notre ère. Les fresques égyptiennes attestent aussi de l’importance de la vigne à leur époque. La vigne et le vin ont leur place dans la tombe d'Ouserhat, scribe royal sous Aménophis II, ou dans celle de Nebamun, sous Thoumôtsis IV (fils d'Aménophis II). Il ne s'agit pas d'un sujet aussi profane qu'on pourrait l'imaginer, car le vin (rouge) est assimilé au sang du dieu Osiris, tué et dépecé par son frère Seth. Enfin, le vin favorise l'ivresse et donc l'amour et la sexualité.

Le pressage du raisin a lieu dans une grande cuve où les hommes piétinent longuement les grappes. De chaque côté sont représentées des colonnettes florales dont les chapiteaux ouverts supportent des poutrelles. Pendant de ces supports, des branches feuillues (en fait probablement des cordes) tombent à la hauteur des hommes qui s'y agrippent. Il faut regarder au milieu pour avoir la suite de la scène. Deux hommes apportent les jarres pleines qui sont alors stockées sur trois rangs. Un scribe agenouillé note tout, y compris le nombre de paniers amenés au pressoir. En Egypte, les vendanges avaient lieu au tout début de l'été, juste avant la saison des pluies, à la mi-juillet. La réapparition dans le ciel de l'étoile Sothis (vers le 18 juillet) était pour les Égyptiens le signe d'une inondation prochaine du Nil.

1c. Entre 1907 et 1938, sous la direction de l’égyptologue britannique Norman de Garis Davies, la section graphique de l’expédition égyptienne du Metropolitan Museum of Art  entreprend un projet de documentation dans le but d’enregistrer les monuments anciens aussi précisément que possible. Ce fac-similé copie la décoration peinte sur le mur de gauche lorsque l’on entre dans la chapelle funéraire de Nakht (tombe thébaine n° 52), scribe et astronome qui a probablement vécu sous le règne de Thoutmôsis IV.

L'IVRESSE PERMET DE COMMUNIQUER AVEC LES MORTS

2. Ce détail d’une scène de banquet montre deux invitées et une jeune fille servant un liquide dans une petite fiole. Elle est montrée dans une pose inhabituelle, le dos tourné vers le spectateur. La consommation de boissons alcoolisées a été un élément clé de nombreuses célébrations.

En plus de la consommation sociale, les participants à certains festivals, tels que la Belle fête de la vallée, buvaient en excès pour atteindre un état altéré d’ivresse, de désorientation et de somnolence qui était censé permettre la communication avec une divinité ou les morts. À cette fin, des drogues auraient également pu être servies. De petites fioles, comme celles tenues par le serviteur à gauche, auraient pu contenir des concentrés d’herbes ajoutés au vin pour augmenter son effet (Source : The Met).

DES OFFRANDES ALIMENTAIRES PERMETTENT LE REPAS DES MORTS

3. Chez les Égyptiens de l'Antiquité, les cérémonies et croyances liées à la mort représentaient une part importante de leur vie. Les préoccupations liées à la mort au cours de l'Égypte antique étaient religieuses. Le mythe de la mort représentait un aspect très important de la religion des égyptiens, mais constituait surtout une étape importante de la vie du pharaon, frère des dieux, qui devait après son décès vivre auprès de ceux-ci un repos éternel.

Les Égyptiens considéraient qu'après le décès l'âme du défunt pouvait renaître et accéder au « royaume des morts » et au repos éternel. Ils ont pour objectif de nourrir leur ka, son souvenir sur terre, ce qui doit être entretenu et nourri dans le monde des vivants, notamment par les membres de la famille ; et d'aliment leur ba, leur capacité à quitter le monde de l'au-delà, celui des dieux, pour rejoindre celui des vivants. Le prêtre incite le défunt à se nourrir des offrandes présentées.

4. Les invités aux banquets sont généralement représentés avec de beaux vêtements et des bijoux sophistiqués, et dans un état de jeunesse éternelle. Ce fac-similé montre ici partiuellement une grande scène de banquet. Le plus grand personnage représente le défunt, le sculpteur Nebamun, avec les membres de sa famille immédiate, tandis que les autres participants sont présentés dans des tailles plus petites. Devant lui se tient une figure féminine - Henutnefret, sa femme ou sa sœur - qui lui tend un bol de vin en disant : « Buvez et ayez une journée heureuse ! » Les participants buvaient le plus souvent une quantité excessive d’alcool lors de ces célébrations.

DES BANQUETS SONT ORGANISES PAR LES PRINCES ETRUSQUES

5a. Les Étrusques passent pour avoir été de grands consommateurs de vins et des amateurs de luxe. Dans la région semi-montagneuse de l’Étrurie, les vignes poussaient en abondance sur les coteaux et faisaient l’objet d’une culture intensive. Les nombreuses amphores retrouvées prouvent que le vin élaboré par les Étrusques était exporté dans tout le bassin méditerranéen. Dès le VIIIe siècle avant notre ère, les banquets étrusques, dont la forme est empruntée au monde grec, sont organisés par les princes.

La cérémonie est très ritualisée. Au son des flûtes ou des lyres, femmes et hommes y dégustent, couchés, du vin servi par des esclaves. Ces fêtes rivalisent de richesses. Les services à vins y sont réalisés dans des métaux précieux et finement travaillés. Conservé dans des vases pansus ou stamnoi, le vin est mélangé à de l’eau dans une grande casserole (patera), un cratère ou un chaudron (lébès), puis placé au milieu des convives. On le puisait alors avec des sortes de louches (simpula) pour le transférer dans  des cruches à vin (œnochoés), avant de le servir individuellement dans des coupes. Parfois, ce vin était filtré de ses impuretés au moyen d’une passoire avant sa consommation (Source : Inrap).

5b. Les comastes [les participants au Komos*] s'adonnent aux plaisirs du symposium, en écoutant de la musique, en buvant du vin et en jouant au Kottabos**.

5c. Ce mur nous montre un jeune homme nu qui sert à boire (un échanson), près d'un krater, vase de grande taille utilisé pour le mélange du vin avec de l'eau, souvent placé au centre du symposium.

L’individu qui a été enterré a choisi de répondre aux codes régissant le symposium en dépeignant l’idée que « le plaisir de boire du vin est projeté sans équivoque au-delà de la vie » (Cipriani, Marina. Les Lucaniens à Paestum. Vol. 1. Pæstum, Italie: Fondazione Pæstum, 1996). 

Généralement un cortège bruyant et festif de buveurs accompagnés de musiciennes, caractéristique dans les représentations de banquets et fêtes dionysiaques. Figure régulièrement sur les vases attiques dès le VIème siècle av. J.-C.: Vin des Arts, objets d'art

 

** Le cottabe (kottabos) est en Grèce antique un jeu d'adresse pratiqué lors des symposiums ou encore dans les établissements de bains. Il est très populaire aux Ve et IVe siècles av. J.-C. C'est un détournement ludique de la libation effectuée au début de chaque banquet lorsque l'on verse quelques gouttes de vin sur le sol en invoquant le nom d'une divinité, principalement Dionysos. À l'origine, pour le cottabe, on versait le reste de sa coupe de vin en invoquant la personne aimée. Par la suite, la pratique s'est transformée en jeu : l'objectif est alors de jeter le reste de vin dans une coupe posée par terre ou sur une table, toujours en prononçant le nom d'une personne aimée. Si les gouttes de liquide atteignent effectivement leur but, c'est un heureux présage. En outre, le gagnant remporte souvent un petit lot : un œuf, une pomme, un gâteau, une coupe, voire un baiser.. L'adresse ne suffit pas : il est important de réussir un lancer souple, de bonne tenue, pour tout dire un beau lancer.

DIONYSOS DECOUVRE LES MUSES AVEC SA MERE

6. A l’écart de Pompéi, la Villa des Mystères est une ancienne demeure praticienne. Dans le quartier des maîtres, une salle renferme la fresque à laquelle la villa doit sa célébrité et qui vient tout juste d'être restaurée : sur fond rouge pompéien, une frise se déroule une grande composition qui met en scène vingt-neuf personnages grandeur nature. Elle pourrait représenter l’initiation d’une jeune épouse aux mystères dionysiaques, ici la lecture du rituel par un Dionysos (?) enfant. Le culte de Dionysos, dont la maîtresse de céans aurait été prêtresse, était alors en grande faveur en Italie méridionale. La scène présentée au premier plan est étrange : une femme habillée d'un péplos à l'ancienne mode (tunique féminine en laine de style dorien de la Grèce antique) surveille un jeune garçon nu et chaussé de hautes bottes, qui lit un uolumen (rouleau de feuilles de papyrus).

Une autre femme, portant cette fois-ci un habit contemporain de la frise, se tient assise derrière l'enfant. Elle tient dans sa main gauche un uolumen et pose sa main droite sur l'épaule droite de celui-ci. Pédagogue divin, elle lui enseigne son art. La péplophore (celle qui porte le péplos) est une évocation de la nourrice de Dionysos qui apparaît toujours dans ces scènes, en particulier de toilette et d'habillage du héros. Enfin, s’il n’y a nulle trace que Dionysos ait jamais appris à lire, le livre ouvre sur la connaissance et l'univers supérieur des Muses. Notre prêtresse inscrit donc ici son activité pédagogique de mère profane à l'intérieur du mythe de Dionysos, en s'identifiant cette fois-ci à la à la mère du héros, Sémélé.

"BACCO-GRAPPOLO", PROTECTEUR DES VIGNES ET DU VESUVE

7. Cette fresque du Ier siècle ap. J.-C. provient du mur latéral d'un laraire* situé dans l'atrium de service de la maison du Centenaire à Pompéi, fouillée entre 1879 et 1881; les autres fresques du laraire sont conservées in situ. Dans la partie supérieure, on peut voir une guirlande votive ornée de rubans, sur laquelle repose un oiseau, motif que l'on retrouve sur les peintures funéraires et les laraires ; sur la gauche apparaît Dionysos-Bacchus, dont le corps s'orne d'une gigantesque et inhabituelle grappe de raisin. Il reste cependant identifiable à ses attributs : les cheveux longs dénoués tombant sur les épaules, la couronne de lierre ; il tient le thyrse attribut de Dionysos : bâton décoré de feuilles de vigne ou de raisins, surmonté d'une pomme de pin  orné d'un ruban d'une main et abreuve de vin sa panthère avec un canthare coupe à boire de l'autre.  En arrière-plan, est représentée une montagne dont les flancs sont couverts de vignes bien ordonnées. Dans la partie inférieure se déroule un long serpent, élément récurrent des laraires pompéiens, qui se dirige vers un autel cylindrique ; il représente le genius loci, le bon génie du lieu. C'est un symbole positif, lié au monde chthonien souterrain, situé à l'intérieur de la terre et donc associé, entre autres, à la fertilité. Dionysos est aussi considéré comme le protecteur du Vésuve. Il est très probable que les Pompéiens n'avaient pas connaissance de sa nature volcanique du Vésuve et le considéraient comme une force protectrice de leur ville et de sa prospérité. Les vignes y produisaient le Vesuvinum (source : Pline), un vin fameux qui, avec le Pompeianum, contribuait à la richesse de la ville.

* Le laraire, ou lararium, est un autel ou sorte de petit sanctuaire destiné au culte des Lares, les dieux du foyer. Parfois aussi appelés Genii loci, ils sont des divinités romaines liées à un lieu donné. Le Lar familiaris est ainsi le dieu de la maisonnée qui protège toute la famille.

Pour en savoir plus : Galeries "Nectar des dieux" >>

LE RHYTON, POUR VERSER OU POUR BOIRE DU VIN

8 et 9. Le rhyton est un vase à boire antique en forme de corne ou de cornet façonné en métal ou en terre cuite, parfois en verre, terre cuite ou en métal, parfois en verre. Il représente, le plus souvent une tête d'animal, parfois humaine. S'il était utilisé pour boire, il l'était aussi pour certaines cérémonies et rituels religieux, lors de libations. La fresque ci-jointe représente deux Lares versant du vin dans un seau (situla) avec un rhyton. Ils encadrent une scène sacrificielle. Le chef de famille fait des offrandes, un musicien joue, tandis que deux plus petits personnages apportent des objets et un cochon pour le sacrifice. Peu à peu, le rhyton ne servira plus de déversoir, mais sera plutôt utilisé comme récipient, comme dans ce banquet.

Pour en voir plus : Le Vin des Arts, objets d'art >>

Silène vieux avec un canthare et un thyrse, Villa Getty, Los Angeles, fresque, 1-79 ap. J.-C.
Femme (Ménade ?) tenant un plat, fresque, 1-79 ap. J.-C.
Dionysos tient un kantharos et Ariane lève un rhyton, Villa Getty, Los Angeles

Villa Getty, Los Angeles, fresques décorant vraisemblablement la même pièce, sur le mur et au plafond, 1-79 ap. J.-C. : Silène vieux avec un canthare et un thyrse /  Femme (Ménade ?) tenant un plat /  Dionysos et Ariane ( qui lève une corne à boire cérémonielle appelée rhyton, tandis que Bacchus tient un kantharos, coupe à boire)

aa3d3913-5284-4fa2-a02a-6e88dbb2703b_3263 alt.jpg
wall-painting.png

Fresque romaine, Une femme boit sur en balcon, 9 av. J.-C.-14 ap. J.-C., Villa Getty, Malibu, Californie, E-U /  Banquet, Un homme allongé boit à l'aide d'un rhyton. Provient probablement de Pompei, 50-79 ap. J.-C., British Museum, Londres  

Tombe de Ramose, Cortege funeraire, Vallée des Nobles, Thèbes, Egypte

Cortège funéraire, jarres destinées à la tombe de Ramose, « Gouverneur de la ville (Thèbes) et Vizir »., XVIIIe dynastie, règnes d’Aménophis III (1390-1352) et d’Akhénaton (1352-1338 av JC), Vallée des Nobles, Thèbes, Egypte

PS Wine and Papyrus Treasures of Amun Tom of Rekhmire Dynasty 18 v BC 1479 1425 Thebes (2)

Vin et papyrus pour les trésors d'Amon, Tombe de Rekhmire, c. 1479-1420 av. J.-C., facsimilé, The Metropoltan Museum of Art, New York

PS 30.4.118_EGDP022609 Winemaking, Tomb of Ipuy.jpg
PT 30.4.124_EGDP017841.jpg

The Metropolitan Museum of Art, New York, facsimilés : Elaboration du vin, Tombe d'Ipuy, c. 1279-1213 av. J.-C. /  Ameneminet verse une libation et encense le roi Mentuhotep II et la reine Ahmôsis-Néfertari avec au-delà, dans la montagne thébaine, la déesse vache Hathor. Mentuhotep II et Ahmès-Néfertari sont montrés à titre posthume, non pas comme des êtres vivants mais comme des images, 1295-1170, Tombe d'Ameneminet, Thèbes ouest

 

A LA CROISÉE DES ARTS

bottom of page