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De vigne en vendange, de cave en port

Très Riches heures du Duc de Berry, calendrier, mars - Barthélémy d'Eyck, c. 1440 - Musée Condé, Chantilly | De vigne en vendange, de cave en port | Enluminure | Vin et Peinture | Le Musée Vituel du Vin

TRÈS RICHES HEURES DU DUC DE BERRY, CALENDRIER, MARS

Frères Limbourg et Barthélémy d'Eyck, c. 1440

Musée Condé, Chantilly

 

 

 

 

 

Les Très Riches Heures du duc de Berry sont l'aboutissement d’un travail échelonné sur plus de 80 ans. Ce manuscrit est commandé par le duc de Berry aux frères de Limbourg vers 1410-1411. Inachevé à leur mort et à celle de leur commanditaire en 1416, il est probablement complété, dans certaines miniatures, par un peintre anonyme dans les années 1440 (Barthélemy d'Eyck ?). En 1485-1489, il est achevé dans son état actuel par le peintre Jean Colombe pour le compte du duc de Savoie. Cette enluminure entre dans la composition de la première partie du manuscrit, la plus célèbre, le calendrier. Le mois de mars est illustré par les travaux agricoles de la fin de l'hiver. Chaque champ contient une étape différente des travaux, tous séparés par des chemins se croisant au niveau d'un édicule appelé une "montjoie". Au premier plan, un paysan laboure un champ de céréales à l'aide d'une charrue à versoir et avant-train muni de deux roues, le tout tiré par deux bœufs, l'homme les dirigeant à l'aide d'une longue gaule. Des vignerons taillent la vigne dans un enclos à gauche et labourent le sol à l'aide d'une houe pour l'aérer. Pour la vigne, mars est depuis toujours le meilleur mois pour la taille. La vigne est cultivée en foule.

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Sur la droite, un homme se penche sur un sac, sans doute pour y puiser des graines qu'il va ensuite semer. Enfin, dans le fond, un berger emmène le chien qui garde son troupeau. À l'arrière-plan figure le château de Lusignan (Poitou), propriété du duc de Berry qui l'a fait moderniser. On voit à droite de l'image, au-dessus de la tour poitevine, un dragon ailé représentant la fée Mélusine. En 1392, Jean d'Arras a composé pour Jean de Berry la Noble histoire de Lusignan, appelé aussi Roman de Mélusine, dans laquelle il raconte l'histoire de la fée, ancêtre imaginaire du duc. Selon la légende, Mélusine a donné naissance à la lignée des Lusignan et serait le bâtisseur de la forteresse. Épouse de Raymondin de Lusignan, elle lui a promis la richesse et le bonheur, à la condition qu'il ne la voit jamais le samedi, jour où son corps prend l'apparence d'un dragon. Un jour, Raymondin rompt le pacte et observe sa femme au bain. La fée s'enfuit alors en prenant la forme d'un dragon.

Au Moyen-Âge, presque sous tous les climats, les vignobles ceinturaient les villes, petites et grandes. C'était sans doute un moyen d'éviter les transports onéreux du vin, sujets à de lourdes taxes et aléatoires dans les conditions de l'époque. Aussi buvait-on les vins de son coin et on n'en consommait pas d'autres. Tout était meilleur que l'eau pure ! La culture de la vigne connaît à cette époque une très large extension. L'importance liturgique et symbolique du vin, comme du pain, dans le monde chrétien, impliquait une place de choix pour ces cultures dans l'iconographie. La taille des ceps, en février ou en mars, déterminante pour la production future, est un des motifs les plus fréquents, en particulier dans les calendriers.

 

Les images de miniatures et manuscrits nous permettent de mieux connaître la vie au Moyen Âge et notamment les travaux qui incombent aux paysans au cours de l’année agricole et dont le thème iconographique du calendrier permet la représentation. L'enluminure est la seule iconographie de l'époque traitant des scènes de genre. Aux XIIe et XIIIe siècles, les mois figurent des paysans en pleine action et s'intègrent à la décoration des églises, et notamment de leurs portails, de leurs chapiteaux et de leurs vitraux ; tandis que quelques calendriers ornent, dès cette époque, plusieurs livres liturgiques. Si, aux XIVe et XVe siècles, les travaux des mois ne s'inscrivent plus que sur quelques bâtiments profanes, ils ornent de très nombreux livres de prières. En s'emparant d'un thème païen déjà fixé par l'Antiquité gréco-romaine, l'Église et les théologiens ont conféré à ces images un sens nouveau : l'homme, à la suite d'Adam et Ève, subit le travail comme un châtiment et un moyen de se racheter.

EN VIGNE

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1 à 9. Les mois de mars et septembre évoquent les deux grands moments de la viticulture : la taille de la vigne et les vendanges. Il en est de même parfois des mois d'avril (taille tardive), août (préparation de la vendange et de la vinification) et octobre (vendanges tardives et/ou foulage du raisin. La fin de l'hiver est également le moment de la plantation de nouveaux plants (Weinbau Psalter), des remontées de terre (Bréviaire Grimani). De nos jours, le remontage de la terre a lieu en novembre ou décembre. Pour les vignobles en pente et sous l'action des ruissellements, les ceps plantés au sommet des coteaux se déchaussent peu à peu ; il faut donc procéder à une remise en place de la terre.

 

4. Le Traité d'agronomie de Pietro de' Crescenzi illustre bien le travail des vignerons lors de la taille de la vigne. Elle s’effectue à l’aide d’une serpe à dos tranchant et saillant, avec une lame assez large. Le paysan, penché en avant, saisit de sa main gauche le sarment au-dessus de la serpe, qu’il tient de sa main droite. Au second plan, un autre paysan répète le même geste, mais agenouillé pour pouvoir tailler des branches plus basses.

EN VENDANGE

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DE CAVE EN PORT

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2.  Le Pontifical de Guillaume Durand est orné de nombreuses peintures. Celles des marges sont des caricatures de la vie du Moyen-Âge, où les personnages sont représentés par des animaux réels ou fantastiques, par des singes surtout.

 

Michel Pastoureau nous rappelle que si "l'homme était le champion antique du sens du goût, il est au Moyen-Âge supplanté dans ce rôle par le singe, qui porte tout à sa bouche. » C'est un animal qui veut ressembler à l'homme, on dit bien le "singer". Il semble donc bien naturel de le retrouver ici en viticulteur qui s'apprête à "taster" son vin", tout comme un bon moine.

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